
13 NOVEMBRE 2015
Novembre 2015
TERREUR – DRAME – ABOMINATION – SANG – LARMES – DEUIL – BARBARIE - #PrayForParis – 13 NOVEMBRE 2015.
​
Aucun mot, aucune expression ne manque à l’appel, depuis quatre jours. Notre horloge nationale s’est arrêtée, notre Nation est devenue prisonnière d’un abominable carcan fanatique a priori incassable. Notre douleur n’a pas d’égal – au même titre que nos mots qui, si l’on en croit les incroyables frasques de nos chers concitoyens et celles de nos Hommes politiques, ont incroyablement radicalisé notre pensée.
Peut-on souffrir cet effroyable mouvement de colère rhétorique ? Est-il acceptable de délaisser notre humanisme convaincu afin de faire place à une pensée collective – que nous rapporte la doxa – aussi précaire que rétrograde ?
L’humanisme, parlons-en, tiens. L’idéologie soixante-huitarde que regrette Michel Onfray, qui faisait s’exprimer les prolétaires déterminés par les références marxistes ou Bob Marleyistes, distribuant les exemplaires de Libé en papier trop peu soigné à la sortie du métro parisien. Celle-là encore qui, unanimement, nous assurait une non-haine compréhensive à l’égard de quiconque s’opposait à leurs idées. Notre humanisme franco-français dont nous étions si fiers, cet humanisme aujourd’hui corrodé, abattu consciencieusement – non sans justification.
Les réseaux sociaux se déchainent et dans la cour des grands – que d’aucuns appellent la politique –, on enterre l’hypocrisie générale pour laisser place à une fulgurante cohésion insoupçonnée. Tels des loups assoiffés de vengeance on traque sans relâche les signataires de ces actes terroristes pour les déshumaniser sans honte. Notre pays s’enlise petit à petit dans un sol immoral, éclaboussé d’un fiel dont je n’ose imaginer la portée. Lui, si fier d’exhiber sa liberté, son égalité, sa fraternité. Sur Facebook comme sur France 2, les bavardages incessants autour de faits divers ennuyants laissent place aux grands discours émouvants et consensuels.
Et parfois, mon regard esthète est confronté à des mots que je n’aurais jamais souhaité voir. « Il faut les envoyer à l’abattoir », ai-je entendu une fois ; ou bien encore : « Ce sont des chiens sans âme, aucune psychologie ne pourra justifier leurs actes barbares. » Je vous le dis, mes oreilles et mes yeux assistent, impuissants, à un effroyable élan totalitaire – Vladimir me semble bien précieux, tout à coup.
Je me refuse, aujourd’hui plus qu’hier, à entrer dans un jeu politique qui, à mon sens, n’a aucunement sa place dans la sphère médiatique imposée aux Français. Je parlerai plutôt d’un discours engagé, me proclamant sans scrupule porte-parole d’un humanisme corrompu. Oui, mon âme innocente et trop crédule refait ici surface. Sous l’égide du si bel antimilitarisme de Vian, je fais front, lorsque nous n’avons apparemment plus de libre-arbitre face à la violence orale.
Oui, Monsieur le président, nous sommes en guerre. Notre esprit est en guerre. Notre humanisme est mitraillé. Et bientôt, Michel Onfray se suicidera.